Par Anne Geig

Satisfaire ses clients, c’est bien. Les enchanter, c’est (bien) mieux! Mais comment offrir une expérience qui dépasse les attentes des clients et crée ce fameux effet “Waouh” ?

Depuis 2009, nous menons, de façon récurrente, une étude auprès d’un panel de consommateurs afin de comprendre les ressorts de l’enchantement client. Ces mesures multi-marchés nous ont permis de dégager 5 piliers qui structurent l’expérience client et donnent les clés de l’enchantement. Ces 5 piliers, au carrefour de l’offre, du marketing, des process et de la relation client, sont des clés de lecture essentielles pour toute marque qui cherche à penser, différencier et optimiser l’expérience client qu’elle propose.

L’enchantement client : pourquoi ?

Dans un premier temps, il nous semble important de revenir sur une question souvent posée : pourquoi devrait-on chercher à enchanter ses clients ? Pourquoi ne pas se contenter de délivrer un service, de façon qualitative et satisfaisante ?
Nous avons déjà abordé ce sujet sur notre blog (voir l’article : L’enchantement clients, au-delà de la satisfaction clients) mais pour résumer, voici quelques éléments de réponse.

  1. Il est essentiel de prendre en compte le contexte de défiance dans lequel se forgent les opinions des citoyens, consommateurs, clients. Ils n’ont pas plus confiance dans les discours des marques que dans ceux des politiques ou des médias. Trop souvent déçus, dupés, les consommateurs se tournent vers leurs pairs, le bouche à oreille, les avis clients pour obtenir une information qu’ils estiment plus fiable. Les millennials, biberonnés à Facebook, Airbnb, Uber, sont encore plus imprégnés de cette culture du pair-à-pair.
    C’est donc largement par l’expérience, la leur et celle de leurs pairs, que les consommateurs tissent leurs liens avec les marques et que les images et les réputations se construisent.
    Vos meilleurs commerciaux aujourd’hui sont vos clients, qui se feront vos ambassadeurs.
    Et comme seules les expériences mémorables laissent une trace, seuls les clients hyper satisfaits, bluffés, bref, enchantés se feront les avocats de votre marque.
  2. Le pouvoir des consommateurs, à l’heure des réseaux sociaux, n’a jamais été aussi fort. Les marques ne peuvent plus se cacher. Les consommateurs ont les moyens techniques à la fois d’être beaucoup plus vigilants (avec un accès à toutes les informations produit depuis leur smartphone ou leur clavier) et de contribuer à une plus grande transparence (facilité de témoigner).
  3. La plupart des marques sont devenues des géants, des organisations mondiales complexes, souvent contactées à distance par les clients, via une multiplicité de canaux différents… ce qui a largement complexifié l’expérience.

Dans ce contexte de défiance et de complexité, le besoin de rassurer, simplifier, et proposer une expérience mémorable devient essentiel. Bref, il faut savoir enchanter.

Les marques qui tirent leur épingle du jeu sont celles qui ont su créer de véritables expériences clients, au-delà du produit ou du service rendu. Créer l’enchantement, ce fameux “effet Waouh”, c’est à la fois un moyen de vous différencier face à vos concurrents, et un moyen de convertir vos clients existants en clients fidèles. C’est la stratégie d’acquisition et de fidélisation la plus rentable.

Il n’est pas question d’enchanter à chaque interaction ou chaque point de contact. L’enjeu sera d’identifier les moments du parcours client où l’enchantement aura le plus d’impact et sera le plus riche de sens. Les 5 piliers de l’expérience client apportent une grille de lecture du point de vue des clients, qui permet d’évaluer l’expérience que vous leur offrez. Ils reflètent leurs attentes transverses, qui dépassent vos process, vos silos. Ces piliers sont ceux qui structurent l’expérience client, qui sous-tendent leur ressenti.

C’est grâce à cette grille de lecture que vous pourrez identifier les attentes profondes de vos clients vis-à-vis de votre marque et de votre marché, et les meilleurs moments du parcours client sur lesquels vous pourrez y répondre de façon mémorable, en suscitant de l’enchantement.
Toute la stratégie de l’Expérience Client peut se dessiner à partir de la compréhension de ces attentes.

Pilier n°1 : les prestations

Sans surprise, la principale source d’enchantement est relative à la délivrance de la prestation, et plus particulièrement des prix, de la livraison et de l’emballage des produits. C’est sur ces sujets que se crée l’enchantement.

A retenir

  • Les clients d’aujourd’hui sont plus que jamais sensibles aux prix et aux promotions. Ils sont à la recherche de la bonne affaire. C’est une source de satisfaction particulièrement intense. Ainsi la générosité des programmes de fidélité contribue à l’enchantement : fréquence des remises, qualité des cadeaux, importance des remises accordées sont autant de raisons de rester fidèle à une marque.
  • Le moment de la livraison est un moment de vérité du parcours clients. Les clients sont très sensibles à la qualité de l’emballage : un emballage soigné = un client choyé. Ouvrir un colis, c’est un peu comme ouvrir un cadeau ! (A ce sujet lire notre article : Soignez l’emballage des produits pour enchanter vos clients). Le deuxième point clé est l’attitude du livreur, qui est souvent un aspect négligé de l’expérience. La ponctualité, la courtoisie, le soin porté à la manipulation du colis, à la propreté des lieux, sont de réels critères différenciants… et sous-exploités. Pour aller plus loin, lisez notre article : La livraison, trou noir du parcours client ?

Pilier n°2 : l’orientation client

  • C’est la capacité́ de la marque à penser tous ses process et ses pratiques relationnelles dans l’intérêt du client.
    Le client doit être convaincu qu’il est bien au cœur des stratégies de l’entreprise, que sa satisfaction prime sur l’intérêt de la marque.
    Les consommateurs d’aujourd’hui veulent des marques capables de montrer qu’elles ne sont pas exclusivement tournées vers leur objectif premier de vente, de profit. Nous en parlions dans notre article : L’intérêt du client d’abord !Il est important de leur envoyer des signaux qui vont dans ce sens. Ils veulent oublier leur statut de consommateurs et être traités comme des ‘humains’ avant tout. Ils attendent des marques qu’elles regardent au delà de leur porte-monnaie, même s’ils ne sont pas dupes de la finalité (syndrome du client porte-monnaie, du client vache-à-lait)…
    Ainsi les clients sont sensibles au temps accordé par les vendeurs (ils ne doivent pas donner le sentiment que ce temps est compté), à la qualité des conseils apportés, à la façon de traiter les ‘petits’ clients. Les petites attentions (célébrer les anniversaires ou les moments de vie importants, offrir un café ou un petit cadeau aux enfants…) ont un fort impact et font la différence.Par ailleurs, les consommateurs veulent des marques capables de vendre dans leur intérêt (quitte à vendre moins ou moins cher). Ainsi, diriger systématiquement le client vers l’offre la plus chère est une pratique commerciale court-termiste qui nuit considérablement à la marque. À l’inverse, conseiller une offre moins chère et plus adaptée, ou proposer une remise ou une promotion spontanément, sans que le client n’ait besoin de la demander, est perçu comme un geste d’honnêteté, un signe que l’intérêt du client prime.L’orientation client d’une marque est particulièrement visible lors de moments clés comme le recours au Service Client. C’est là que l’on voit, une fois que la transaction a eu lieu, si la marque est toujours capable de faire des efforts pour ses clients, si c’est l’intérêt de l’entreprise ou celui du client qui prime.
    Lors de la résolution d’un dysfonctionnement, les clients se sentent “bien traités” lorsque la marque :

    • Cherche la solution la plus favorable au client,
    • Dépasse les attentes du client (par exemple, en proposant une solution même si la marque n’est pas responsable du dysfonctionnement),
    • Ne se cache pas derrière des questions de responsabilité mais prend en compte le préjudice ressenti par le client,
    • Fait en sorte que le client sorte gagnant de sa déconvenue (c’est le slogan de l’AMARC : “Transformer le pépin en pépite”),
    • Propose systématiquement un dédommagement,
    • Agit vite, et propose des solutions.

    A l’inverse, dans les parcours de Service Client, le mécontentement vient souvent de process absurdes et défavorables au client, imposés par la marque.

Pilier n°3 : la facilité

  • C’est la capacité́ de la marque à proposer une expérience fluide, facilitée, selon le principe du moindre effort pour le client.
    Les marques doivent rechercher, dans toutes les interactions avec leurs clients, à simplifier, faciliter, fluidifier l’expérience.

    Cela passe par 4 leviers principaux :

    • La clarté de l’offre : la complexité des offres est l’un des premiers obstacles à l’expérience client. Dans ce domaine, les clients attendent beaucoup des interactions humaines. La compétence des vendeurs, leur connaissance des produits, leur capacité à clarifier l’offre, à accompagner le client dans son acte d’achat sont des éléments clés.
    • L’accompagnement après l’achat : la clarté des notices et modes d’emploi, la possibilité de faire appel à la marque et d’être conseillé dans l’utilisation du produit créent de l’enchantement car le client ne se sent pas abandonné par la marque dès l’achat conclu.
    • La facilité du SAV et des retours produits : les standards d’excellence, imposés par les champions de l’e-commerce, consistent à permettre de retourner un produit après l’achat facilement, sans frais et sans justification.
    • Les process de commande et la qualité du suivi : le client doit pouvoir savoir à tout moment où en est sa commande, sa demande. L’accès à cette information doit être simple. Le client doit, si besoin, pouvoir contacter facilement le service client et obtenir systématiquement des réponses rapides. Mieux, le fait d’être spontanément et proactivement contacté

Pilier n°4 : la singularité

  • C’est la capacité́ de la marque à adapter l’expérience en fonction des particularités des clients (clients fidèles, clients en situation de crise, clients ayant subi un dysfonctionnement…).
    Ce pilier est celui qui croît le plus depuis nos deux dernières vagues d’étude sur l’enchantement client.Les clients veulent être reconnus, avec leur historique, leurs préférences, leur situation personnelle quand ils la communiquent. Et par ailleurs, ils attendent des marques de savoir prendre en compte des circonstances ou attentes particulières, ponctuelles, conjoncturelles. La capacité des marques à apporter des réponses, et même à faire des efforts particuliers dans ces moments-là, à créer des exceptions aux règles est une attente grandissante.

    Quelques pratiques qui suscitent l’enchantement :

    • La proximité : il est plus facile de traiter avec le magasin ou l’agence de quartier qu’avec le service client. Plus le personnel est proche, plus il sera à même de (re)connaître le client et de le traiter de façon personnalisée. C’est le désir de retrouver les avantages du petit commerce local, où l’on est reconnu, appelé par son nom, où l’on peut avoir un contact direct avec le patron.
    • La qualité d’écoute : 60% des Français regrettent que les vendeurs ne comprennent pas leurs besoins (selon une étude Opinion Way de 2014). Ainsi, le sentiment d’être réellement écouté, compris, et conseillé selon ses besoins propres est une source d’enchantement. Cela peut passer par la politique de l’interlocuteur unique : plus le client sera suivi par le même interlocuteur tout au long de son parcours, et plus la personnalisation de l’expérience sera possible.
    • La reconnaissance de la fidélité : si les programmes de fidélité sont davantage perçus comme des sources de bonnes affaires, on remarque que les clients sont sensibles à un traitement personnalisé de la fidélité : remises consenties spontanément au cas par cas, faveurs, exceptions aux règles (“C’est bien parce que c’est vous !”). Il s’agit de passer d’une approche comptable à une approche relationnelle de la fidélité.
    • Le dévouement de la marque : les consommateurs sont bluffés lorsqu’ils sentent que tout est mis en œuvre pour les satisfaire, que ce soit par l’intermédiaire d’un employé particulièrement impliqué, ou que cela soit intégré aux process, et dans l’ADN de la marque.
    • La sollicitation des clients par la marque : quand les marques interrogent proactivement et individuellement leurs clients sur leur satisfaction, ou qu’elles sollicitent leur expertise en les mettant en relation avec des acheteurs potentiels pour donner leur avis, la gratification ressentie laisse des traces durables. Un client valorisé est un client engagé !

    Les milliennials sont particulièrement sensibles à cette ‘culture client’ des marques, eux qui ont grandi avec Amazon, Apple… Leurs attentes sont encore plus exigeantes dans ce domaine.

Pilier n°5 : l’intégrité

  • Ce sont toutes les pratiques commerciales et les process qui inspirent et construisent la confiance, qui ne cherchent pas à ‘profiter’ du client.Nous avons déjà évoqué le climat de défiance qui domine les relations entre marques et consommateurs. Les consommateurs ont appris à se méfier de tout, de l’authenticité des promotions, des variations de prix lors de commandes en ligne, du discours sur l’origine de fabrication, de la fiabilité des avis publiés, etc…
    Pour retrouver la confiance de leurs clients, les marques doivent changer leurs pratiques et leurs process en prenant la pleine conscience de cette défiance.

A retenir :

  • Les clients se méfient des promesses : les déceptions et déconvenues qui créent un sentiment de tromperie entretiennent le sentiment de devoir rester vigilant.
  • L’éthique commerciale est mesurée dans la capacité des marques à tenir leurs promesses après l’achat. Attention aux sur-promesses et aux offres floues, qui ne peuvent conduire qu’au désenchantement. Par exemple, la première facture est un moment de vérité après une souscription à un abonnement (énergie, téléphonie…). C’est le moment où l’on vérifie la transparence et l’intégrité d’une marque.
  • L’obsolescence programmée cristallise cette perte de confiance : ne pas pouvoir faire réparer un produit est un fort motif de désenchantement, voire de rupture quand le client a l’impression que cela fait partie d’une stratégie intentionnelle.

Il est donc urgent pour les marques de revoir leurs pratiques pour chercher à retrouver la confiance des consommateurs.
La possibilité de pouvoir annuler sa commande pendant un laps de temps après le dernier click de confirmation, la facilité des retours, des réparations… Ces pratiques sont des leviers efficaces pour construire la confiance et apaiser les consommateurs.

Pour aller plus loin sur ce sujet, voir nos articles :

Pour terminer…

Si vous souhaitez aller plus loin dans vos recherches sur l’expérience client, et comprendre avec des exemples concrets ce qui nous a amené à définir ces 5 piliers de l’enchantement, nous ne pouvons que vous inciter à télécharger notre étude complète sur l’enchantement client.

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Étude – La première typologie des clients réclamants

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